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Février 2017 - "Notre France" (Raphaël Glucksmann)

Notre France (Raphaël Glucksmann)

Autant vous avertir tout de suite, si j'ai eu l'envie de lire "Notre France" de Raphaël Glucksmann; c'est essentiellement pour y trouver des éléments permettant de soutenir les idées que j'ai souhaité défendre dans une lettre ouverte publiée en octobre 2015 sur mon blog:

http://actualites-et-politique.over-blog.com/2017/05/octobre-2015-lettre-ouverte-pour-une-france-unie.html

Ce qui suit n'est donc pas une "note de lecture" en tant que telle.

Raphaël Glucksmann a été chercher dans notre histoire de France ce qui a construit nos identités et qui est susceptible d'offrir à ceux qui ont plus récemment rejoint notre communauté nationale de trouver ou retrouver la fierté d'être français. Il dit: "quelque chose d'essentiel et d'immatériel s'est brisé, quelque chose d'insaisissable et pourtant indispensable: le bonheur, la fierté d'être ce que nous sommes, d'être français. Une identité nationale n'est ni une donnée naturelle, ni un fichier d'état civil. Elle n'est pas innée et ne sera jamais définitivement acquise. C'est une construction politique et sociale complexe à cultiver sans relâche, sous peine de la voir se déliter".

Comme je l'évoquais dans ma lettre ouverte et le rappelle Raphaël Glucksmann: "nous avons oublié qui nous sommes, d'où nous venons, vers où nous marchons. Avant de mener le combat des programmes, avant de débattre des réformes, avant de penser aux élections, c'est ce grand oubli qu'il faut réparer."

Ce que je suis allé chercher dans ce livre, ce sont les références historiques qui mettent en lumière ce qui a fait de nous un pays d'immigration acceptant la différence mais soucieux de garantir une unité nationale basée sur des principes d'égalité, de liberté et de fraternité.

"Nous sommes le 3 juillet 1315. Louis X proclame dans un édit royal que "le sol de France affranchit celui qui le touche". "Notre royaume est dit et nommé des Francs, et voulant que la chose soit accordant au nom et la condition des gens ...": donnant au nom de "Franc" un sens tout autre qu'une origine ethnique, le roi instaure ce jour-là le primat de l'étendue politique sur la profondeur généalogique, la prééminence du sol sur le sang. Peu importe d'où il vient, peu nous chaut si dans son pays de provenance la servitude fait loi ou non, sans égard ni regard pour son génome, l'étranger en touchant notre terre, est automatiquement affranchi. Il devient Franc, nom qui désigne à la fois un peuple et une condition juridico-politique (la condition d'être libre)".

"Nous sommes en 1560 ... Michel de l'Hospital, le plus grand homme de France selon Voltaire, appelle pour éviter le pire, à remplacer la politique des religions, qui mène à la guerre civile, par la religion du politique, condition de la paix sociale. Son pladoyer va bien au-delà d'une simple exhortation à la tolérance et à la coexistence religieuse, il appelle à libérer la politique de ses chaines théologiques et à soumettre les dogmes religieux aux lois civiles et à la raison d'état".

"Nous sommes désormais le 17 janvier 1562, le chancelier humaniste fait part à l'assemblée des notables du royaume réunie à Saint Germain en Laye de l'édit royal qu'il a rédigé et qui - c'est une grande première dans un pays chrétien - légalise la coexistence de différentes religions sur notre sol en même temps qu'il les soumet à la toute puissance publique ... la foi est ramenée au statut de composante et non plus de fondement du corps social ... Michel de l'Hospital lance entre 1560 et 1562 la grande aventure laïque française"

"Nous sommes le 28 février 1766, un jeune homme de dix-neuf ans est condamné par le présidial d'Abbeville pour impiété et blasphèmes, sacrilèges exécrables et abominables à avoir la langue tranchée, être décapité et brûle en place publique. Son crime, selon les attendus du jugement, est d'avoir passé à vingt-cinq pas d'un procession sans ôter son chapeau qu'il avait sur la tête, sans se mettre à genoux, d'avoir chanté une chanson impie, d'avoir rendu le respect à des livres infâmes au nombre desquels se trouvait le dictionnaire philosophique du sieur Voltaire. Le Chevalier de la Barre est torturé puis exécuté le 1er juillet 1766 ... Face au fanatisme, Voltaire promeut ce qui deviendra le troisième élément de notre sainte trinité républicaine: la fraternité".

"Nous sommes le 23 décembre 1790, l'Assemblée Nationale s'écharpe depuis trois jours sur l'accès des juifs à la citoyenneté. La majorité des députés du clergé y est hostile, ansi que les représentants d'Alsace. Clermont Tonnerre, le plus fervent partisan de leur assimilation ... prononce ces mots devenus célèbres: "Il faut tout refuser aux Juifs comme nation et tout accorder aux Juifs comme individus. il faut qu'il ne fassent dans l''Etat ni un corps politique ni un ordre. Il faut qu'ils soient individuellement citoyens".

Fils et fille de France vous êtes aussi les enfants de Louis X, de Michel de l'Hospital, de Clément Tonerre, du Chevalier de La Barre...

"Ni inscription des racines chrétiennes dans le marbre de la constitution, ni communautarisme anglo-saxon: la France a un modèle propre fondé sur l'assimilationniste laïque. Aux religions de s'adapter à lui et non l'inverse."

"Le cosmopolisme républicain dépasse infiniment l'acceptation de la diversité, des origines, des fois ou des pratiques: c'est la quête du commun par-delà ces différences. une telle quête ne va pas de soi. Elle suppose des creusets, des lieux et des moments de brassage... La France bout, pour le meilleur comme le pire. L'énergie citoyenne est là, disponible, en attente ... Il reste à promouvoir le récit qui leur donne sens, à inventer le débouché politique qui les transforme en projet national. Voici la grande tâche de notre génération".

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